Nîmes

Regards insolites sur la ville et ses habitants

Arthur Schopenhauer à Nîmes

Projet lié : Voyageurs venus d'ailleurs

En 1804, à 16 ans, Arthur Schopenhauer fait un voyage en France avec son père et rédige un journal de voyage .Vous verrez dans ces quelques extraits qu'il fait déjà preuve d'une grande maturité. Il séjourne, lui aussi au grand hôtel du Luxembourg, qu'il note "assez bien"

Détail de la mosaïque de Penthée, IIe siècle ap. J.-C. © Collection du musée de la Romanité de la Ville de Nîmes.

Détail de la mosaïque de Penthée, IIe siècle ap. J.-C. © Collection du musée de la Romanité de la Ville de Nîmes.

Vendredi 6 avril 1804
Ce matin nous sommes sortis pour voir les célèbres ruines de l’époque romaine qui se sont merveilleusement conservées à Nîmes. Nous avons d’abord examiné la plus ancienne : le grand amphithéâtre (les Arènes). Les siècles successifs n’ont pas réussi à détruire de telles masses de pierres entassées. Cet immense et vénérable édifice est presque entièrement intact. Nous d’imposants escaliers et logeâmes les galeries intérieures qui mènent à des gradins s’échelonnant les uns au-dessus des autres et dont seuls les étages inférieurs sont délabrés. Je ressentis une curieuse sensation lorsque je m’assis sur les sièges qu’avaient utilisés les Romains pour assister à leurs spectacles. Sur plusieurs d’entre eux, je déchiffrais des inscriptions à demi effacées, qui sont vraisemblablement les noms de ceux qui y prirent place il y a plus de mille ans. Sur d’autres pierres, on avait inscrit des noms et gravé des écussons sur lesquels on pouvait lire des années en chiffres romains, nous renseignant précisément sur les dates qui font de ces inscriptions le témoignage de vestiges remarquables. Le voyageur qui s’immortalisa au XIVème ou au XVème siècle ne pensa surement pas à tout cela. Ces pierres patinées qui ont traversé tant de siècles évoquent le souvenir de milliers d’hommes tombés en poussière depuis si longtemps et qui, comme moi, ont déambulé au milieu de ces ruines, chaque jour de leur vie. Si l’on peut dire de l’existence de l’homme qu’elle est courte, c’est en comparaison de la durée de l’existence de ces monuments. Des étages supérieurs on a une vue magnifique sur la région cultivée de Nîmes dont le vert printanier et frais se détache, et contraste singulièrement avec ces ruines millénaires. Quelle tristesse on ressent à voir des maisons misérables construites à l’intérieur de l’amphithéâtre, transformées en boutiques, en cabaret, débits d’eau de vie, quand on sait que les arcades inférieures servaient autrefois probablement d’abris aux animaux ; mais maintenant il parait que l’on va mettre un terme à cet abus, et démolir les maisons de l’amphithéâtre.

Le jeune Schopenhauer poursuit sa visite des monuments de Nîmes

De là nous sommes allés dans une boutique dont le propriétaire découvrit un revêtement en mosaïque lorsqu’il la fit construire. Ce magnifique travail qui devait servir à un bâtiment public ou à la maison d’un noble romain, couvre maintenant le sol d’une boutique ; parfaitement conservée, la mosaïque a été très joliment exécutée avec beaucoup de goût. Après avoir vu toutes les ruines, nous avons visité la librairie Buchet, après avoir visité son magasin d’antiquités. M.Buchet est un vieillard très aimable qui montre ses objets avec plaisir, et d’une manière très intéressante. Il nous a donné un livre avec des eaux fortes sur les ruines de Nîmes…..La partie de Nîmes que j’ai observée en passant est très bien construite, mais les rues sont très étroites.

 

En 1851 Baltus photographie dans le cadre de la mission héliographique les arènes débarrassées des constructions parasites

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